Logan’s run, la dystopie jeuniste

Les 70s ont été prolixes question dystopies post catastrophe écologique. Dans Logan’s run, l’humanité vit survit dans la jouissance. Mais…

A chaque fois que je regarde une fiction des années 70, je suis un peu malheureuse de ce que l’on a perdu en terme de liberté et d’esthétique. Après Soleil vert, nous allons donc nous pencher sur un autre monument de la dystopie des seventies, Logan’s run ou L’âge de cristal en français… Une histoire du futur avec du carton pâte mais déjà, quelques sujets qui nous sont fort actuels. Comme la pollution et des populations résiduelles réfugiées dans des cités souterraines pour tenter de survivre. Oui l’éco-anxiété, finalement, ça date pas d’aujourd’hui. Avec bonus surpopulation comme dans Soleil Vert. Sauf que là, la question est vite réglée : à trente ans, les citoyens sont éliminés.

Logan's run, Logan et Jessica

Une courte vie de plaisirs

L’histoire. Au XXIIIe siècle, l’humanité est réfugiée dans des cités-bulles. La vie est plutôt douce et essentiellement consacrée aux plaisirs. Les humains évoluent dans la joie et dans l’insouciance mais pour permettre cet épanouissement, leurs jours sont comptés. A trente ans, ils doivent assister à la cérémonie du carrousel où leurs corps sont désintégrés. Mais il y a tout une fable sur la renaissance. En attendant, il faut profiter. Si la vie est très tournée vers l’exaltation des sens, la reproduction se fait par clonage. Chaque nouveau-né se fait greffer un cristal dans la main qui sert de compte-à-rebours jusqu’à ses trente ans. Et, donc, sa mort.

Logan's run, folie architecturale

De limier à fugitif

Nous suivons Logan, 26 ans, limier de la cité. En gros, son job, c’est de poursuivre ceux qui se soustraient à la cérémonie du Carrousel pour les éliminer. Après une des cérémonies dont il s’est littéralement délecté, il rencontre Jessica, une étrange jeune femme qui porte un ankh autour du cou. Exactement comme l’un des fugitifs que Logan a éliminé. Mmm. En faisant examiner l’ankh, Logan est choisi par l’ordinateur central pour enquêter sur ces fameux fugitifs. Pour le motiver, on lui ampute les quatre ans de vie qu’ils lui restaient. Contraints à la fuite avec Jessica, il va un peu découvrir de sombres secrets et fuir hors de la cité. 

L'âge de cristal, Logan et Jessica

La peur de la surpopulation

Comme je le disais en introduction, on retrouve pas mal de sujets communs aux dystopies des années 70, notamment la question de la régulation de la population. Les ressources de la ville sont finies et pour permettre à tous de s’y épanouir, le nombre de citoyens est rigoureusement réglementé. Les citoyens sont soumis à un âge limite. Exactement comme dans Un bonheur insoutenable où les citoyens meurent à 62 ans. Ou Le passeur où ils disparaissent à un certain âge, acclamés par la population. Les citoyens de Logan’s run acceptent ce destin car, en attendant, ils ont droit à mille et un plaisirs, tout en ne se préoccupant pas de questions de reproduction ou de survie. Logan est le 5e clone d’un Logan, comme Jessica est la 6e version de Jessica, etc. Une reproduction assez proche de ce que nous décrit Huxley dans Le meilleur des mondes.

La cérémonie du cristal

New age, drogue et psychédélisme

Si je name droppe des fausses utopies, ce n’est pas un hasard. Logan’s run est un parfait exemple du genre. Mais en version psychédélique. On comprend parfaitement que Logan et son comparse Francis abuse de tous les plaisirs, y compris chimiques. La cérémonie du carrousel nous est présenté à travers une longue scène qui a tout d’un délire collectif où les spectateurs exultent de joie à chaque fois qu’un corps est désintégré. Une adaptation intéressante des concepts new age en vogue dans les années 70. Logan n’a pas peur de la mort car il renaîtra et ne comprend pas la tristesse de Jessica qui lui explique avoir perdu un ami lors de la cérémonie du Carrousel. 

Logan et Jessica dans Logan's run

Logan à la découverte du nouveau monde

Parlons-en, justement, de Logan. De connard arrogant et globalement immature et capricieux, il va nous servir de parfait lapin blanc dans la face obscure de cette fausse utopie. Alors que la mort se rapproche soudain de lui alors qu’il avait encore quatre ans devant lui, il va alors démonter les mensonges de la société et réaliser que la doxa qu’on lui a enseigné toute sa vie n’est que pur mensonge. Jusqu’à sortir de la ville et nous faire découvrir un Washington rendu à la nature où il va croiser des chats et même un vieil homme. Vieil homme qu’il ramènera ensuite dans la ville pour prouver qu’on peut survivre après trente ans. 

Le vieil homme dans Logan's run

Délicieusement kitsch

Logan’s run peut dérouter par son aspect extrêmement kitsch, notamment ses décors en carton-pâte et maquettes un peu grossières. Personnellement, je trouve que c’est là que réside une partie de son charme. Mais surtout, ce film nous rappelle que déjà, à l’époque des pattes d’eph et du LSD, on avait notion que l’humanité n’allait pas vraiment dans le bon sens. Surpopulation et ressources insuffisantes mais aussi pollution. Mais surtout, Logan’s run a un questionnement très en phase avec la société qui l’a vu naître : la limite des paradis artificiels. Logan est un jouisseur qui ne pense qu’à prendre du plaisir. Précisément ce que la société attend de lui. Alors qu’Ecotopia proposait justement une utopie basée, entre autre, sur la libre sexualité, ici, elle n’est considérée que comme un opium du peuple pour lui faire accepter son funeste destin.

La vie sous les dômes

Pourquoi survivre ?

Finalement, Logan’s run m’a posé une question. Une question essentielle. Pourquoi la survie de l’humanité dans ces conditions ? On comprend bien l’aspect fini des ressources, le danger de la surpopulation mais à quoi cela sert de continuer d’entretenir une humanité qui se reproduit artificiellement et à la durée de vie absurdement limitée ? Surtout qu’ici, l’autorité est représentée par un ordinateur. Les créateurs de la ville ont disparu depuis longtemps et le système se perpétue de façon parfaitement mécanique. Vivre, jouir, mourir, ad libidum. Est-ce donc cela, l’humanité ? 

La cérémonie du cristal dans l'âge de cristal

Déjà 50 ans qu’on tire la sonnette d’alarme

Bref, si vous n’êtes pas rebuté par le côté kitsch de cette dystopie, je vous invite à la regarder. Et à regretter qu’on ait perdu cette folie créatrice des années 70 qui nous racontaient des histoires atypiques qui touchaient néanmoins à des sujets graves. Et aussi à vous demander comment on en est là en 2022, niveau pollution et réchauffement climatique alors que déjà, y a 50 ans, les sonnettes d’alarme étaient tirées.

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