Parfois, quand je suis en galère d’articles par ici, je vais consulter les listes d’oeuvres dystopiques pour retrouver des films ou livres que j’aurais lu mais pas encore chroniqué. Ou pour enrichir ma liste de films à voir ou livres à lire puisque je n’ai que 42 ans donc je suis loin d’avoir tout vu, tout lu. Ou même tout écouté, j’ai mes périodes fiction audio après tout. Mais parfois, dans la liste, un nom me fait tiquer. Ca, une dystopie ? Bof. Comme La cité des enfants perdus de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro. Une dystopie, mais non… Quoi qu’à la réflexion… Parlons donc de La cité des enfants perdus.
Il faut sauver l’enfant Denrée
L’histoire. Dans une ville portuaire, la vie semble difficile pour nombre d’habitants. De nombreux enfants sont livrés à eux-mêmes et jouent les pickpockets. Après une journée difficile, un costaud de foire, One, se retrouve dans sa caravane avec Denrée, son petit-frère. Mais voici que ce dernier se fait kidnapper ! One va donc partir à la poursuite de son petit frère pour le sauver, se frottant aux enfants pickpockets dont la dégourdie Miette.
Une plateforme cauchemardesque
Face au port, sur une plateforme maritime, d’étranges scientifiques s’adonnent à d’étranges expériences sur des enfants. Il y a un scientifique froid qui fait des expériences pour se donner la capacité de rêver. Un cerveau qui barbote dans un étrange liquide et qui se révèle incroyablement cynique, une naine et des clones. Toutes créatures d’un inventeur originel disparu. Ce sont eux qui kidnappent les enfants pour explorer leurs rêves. Le souci, c’est qu’ils font des cauchemars en pagaille…
Un univers complexe
Résumé comme ça, ça paraît un peu tordu et compliqué mais en vrai… c’est tordu et compliqué. Tout comme Delicatessen, on découvre un peu les règles de l’univers, petit à petit. Notamment les liens entre les pontes de la ville et les scientifiques de la plateforme. A travers leur quête, Miette et One vont rencontrer une galerie assez large de créatures, se frotter à une sorte de mafia dirigée par deux soeurs siamoises qui exploitent les enfants. L’univers est résolument steampunk et Jeunet et Caro nous gratifie de milles trouvailles visuelles. Si l’on se perd parfois dans les ruelles de la ville portuaire avec des personnages que l’on a du mal à emboîter dans le puzzle, l’univers de la plateforme est, lui, beaucoup plus clair.
Ne pas jouer à Dieu
Ok, La cité des enfants perdus offre un superbe spectacle visuel mais en quoi est-ce une dystopie ? Et bien en un mot : c’est un Frankenstein version freak. Tout démarre avec l’inventeur qui vivait sur la plateforme qui se crée une famille, petit à petit, pour combler sa solitude. Cependant, la Naine et l’Homme sans rêves se sont rebellés et ont tenté de le supprimer. Classiquement : des créations dépassent leur auteur et prennent leur indépendance. C’est à peu près le pitch de toutes les histoires d’androïdes ou la limite entre programmation du robot et volonté propre n’est jamais claire. Les dystopies nous préviennent de ne pas trop jouer les Dieux… Car ça se retourne contre eux. 100% l’histoire de La cité des enfants perdus.
Une société purement cauchemardesque
Au-delà de cet aspect créationniste, la Cité des enfants perdus nous offre un univers assez cauchemardesque… comme celui des enfants, oui. Tous les personnages semblent malheureux et désorientés : les créatures de l’inventeur, One, Miette, les enfants pickpockets, la plupart des sbires… La société dans laquelle se déploie cette histoire est purement cauchemardesque. Personne n’est à l’abri d’un potentiel crime sans qu’aucune autorité ne réagisse. Au début du film, le père de One et Denrée est assassiné à la foire sans que personne ne réagisse. One va d’ailleurs ramener le corps à leur caravane, ne semblant savoir que faire. D’ailleurs, quand Denrée est kidnappé, il ne peut compter que sur lui-même pour le retrouver. De la même façon, les enfants perdus sont livrés à l’emprise des affreuses sœurs siamoises. La seule lueur d’espoir est l’amitié qui se noue petit à petit entre Miette et One. Miette qui est d’ailleurs particulièrement visible avec sa robe rouge dans cet univers noir et vert. Bon, les scènes entre One et Miette me paraissent hyper cringe aujourd’hui mais ce n’était pas l’intention des auteurs.
Oui, c’est une dystopie
Bref, une dystopie, ce n’est pas simplement une société futuriste avec des gadgets fous. Les créations peuvent être organiques et effrayantes. Toujours est-il que même sans trop de gadgets, la société qui est décrite est cauchemardesque. Donc oui, La cité des enfants perdus est une dystopie.
2 thoughts on “La cité des enfants perdus : la dystopie foire de monstres”