J’ai quelques petites dystopies dans ma besace, je profite d’avoir un peu de temps pour en parler. Ce qui est plutôt chouette dans les dystopies, ce sont les différents sujets que l’on peut y aborder. Dont l’assez classique mais toujours intéressant sujet du sentiments (ou du libre arbitre) des robots. Si je ne sais si les moutons électriques peuvent rêver, je sais que dans l’univers de Westworld, les robots se rebellent.
Un parc d’attraction nouvelle génération
L’histoire. Westworld est un parc d’attraction nouvelle génération qui propose à ses visiteurs de plonger dans une sorte de jeu de rôle grandeur nature avec des PNJ terriblement réalistes. Ces créatures, des robots à l’apparence parfaitement humaine, répètent en boucle la même vie. Les humains en visite viennent interagir avec eux pour vivre une aventure. On découvre alors que ces robots sont à la merci de la cruauté des visiteurs qui peuvent les tuer ou les violer. A leur guise. Les robots sont régulièrement réinitialisés, notamment à leur mort. Ils ne sont pas censés voir les détails qui pourraient les faire douter de leur propre réalité. Mais peu à peu, les robots semblent se souvenir de leurs anciennes vies. Ils glissent alors peu à peu hors du contrôle de leurs créateurs.
Des robots sentimentaux
Et c’est du putain de génie. A dire vrai, je ne me suis pas encore remise de la saison 2 tellement je vois tout l’éventail des possibilités que cet univers offre. Dans la saison 01, on explore surtout le sentiment des humains face à ces créatures, oscillant entre sentiment de puissance infinie et malaise. La saison 02 laisse toute la place aux robots et surtout ceux qui comprennent leur nature et questionnent leur réalité. En se souvenant, ils se créent peu à peu à une théologie, des mythes liés aux humains qui viennent les cueillir pour les réparer. Ils agglomèrent les bribes de souvenirs qu’ils ont d’une vie passée ou de leur bref passage dans le labo des humains qui les réparent ou les font évoluer. On a une fiction avec une religion dont on comprend le développement. Pas juste “ah ben dans ce monde-ci, on croit à Machin, c’est comme ça”. Même si les dystopies n’ont que très peu d’éléments religieux. On part souvent sur un postulat de progrès scientifique qui aurait annihilé Dieu. La figure dominante devient ainsi un archétype de pouvoir (le fondateur, le dirigeant, le super ordinateur…).
Des robots qui dépassent leurs créateurs
Mais surtout, Westworld questionne sans cesse sur cette technologie devenue folle qui dépasse, littéralement, ses créateurs. On assiste souvent aux échanges entre la douce Dolores et ses créateurs. Ils s’émerveillent de sa candeur et de son intelligence polie… tout en se posant des questions sur sa dangerosité. Maeve, un autre robot, parvient à tromper des humains quant à sa nature. Elle développe des pouvoirs de télépathie sur ses congénères que les créateurs du parc ne comprennent pas. Finalement, on n’est pas loin de Terminator avec des machines intelligentes qui prennent en autonomie et dépassent leurs créateurs. Jusqu’à les tuer.
Liens réels ou créés par un scénario ?
Mais Westworld ne nous raconte pas simplement une histoire de robots tueurs. C’est même relativement anecdotique. La série nous raconte surtout une histoire de robots qui acquièrent la conscience d’eux-mêmes et développent des sentiments. C’est toute l’histoire de la quête de Maeve qui cherche la fille qu’elle avait dans un vieux scénario, alors qu’elle a, depuis, été affectée à la direction du saloon. Ce sont les histoires d’amour entre Maeve et le desperado. Pas très intéressante en soi, lui ne sert à rien. Mais cette histoire n’aurait pas dû avoir lieu selon l’auteur, le desperado étant promis à une autre. Ou Dolores et Teddy. Dans la saison 01, Teddy meurt tous les deux jours. Après quelques larmes, Dolores l’oublie rapidement et part à l’aventure avec l’un des visiteurs du site, lui offrant quelques frissons érotico-amoureux. Dans la saison 02 où elle prend conscience de sa propre existence, elle se révèle très attachée à lui… tout en affirmant que les attaches des personnages entre eux n’étaient écrits par les créateurs pour maintenir leurs créatures emprisonnées.
Eternels affres de la douleur
En créant des robots de plus en plus sensibles et conscients, Westworld force le spectateur à ressentir de l’empathie pour eux et tout ce que font. Alors les humains deviennent monstrueux. On a beau savoir qu’ils peuvent être réinitialisés, que leur corps n’est qu’une machine qui se répare, on ne peut s’empêcher de frémir en pensant à toutes les morts qu’ils ont subies, les affres de la douleur, physique ou sentimentale. On est dégoûtés à l’idée de ce parc d’attraction ou ces êtres synthétiques essuient en permanence les dégâts causés par l’être humain, cruel et imparfait. Ces robots donnent la sensation d’être désormais plus évolués que nous, pauvres fous ivres de notre pouvoir. On peut y voir également une critique de la lutte des classes, une réécriture moderne de l’esclavagisme. Dans la série, on perçoit clairement que les visiteurs sont des gens qui ont de l’argent et qui estiment avoir payé pour tuer, torturer ou violer (le personnage de William en est le meilleur archétype). L’argent leur donne le pouvoir. Jusqu’à ce que… c’est assez Hegelien, finalement.
Du coup, va falloir que je voie le film original pour voir comment tout ceci y était traité…
Est-ce que » Klara et le soleil » de. Ishiguro est un roman dystopique ? Roman que j’ai beaucoup aimé et dont la toute fin est proprement déchirante.
Bonjour. Ohlala, je réponds super tard, désolée. Je n’ai pas lu ce roman donc je ne veux pas être trop affirmative mais il me semble que oui. Outre le côté anticipation, le roman a l’air d’interroger la nature humaine. Je vais très vite me le procurer. J’aime bien la littérature japonaise et je trouve que je n’en lis pas assez donc je vais pouvoir joindre l’agréable à l’agréable 🙂