Nouvelle Babel, quand le monde devient ton jardin

Dans Nouvelle Babel, Michel Bussi imagine un monde sans frontière, unifié et pacifié grâce à la téléportation. Jusqu’à ce que…

Je ne me tiens que peu au courant des sorties littéraires. Quand je découvre que Michel Bussi, un auteur de best-sellers français, vient de sortir une dystopie alors que ce n’est pas spécifiquement son genre, je suis très curieuse. Et pour le coup, avec Nouvelle Babel, Bussi nous propose un univers plutôt original. Assez typique des fausses utopies où tout semble idyllique, mais… Car dans La nouvelle Babel, grâce à la téléportation, le monde est ton jardin.

Un monde totalement uni et pacifié

L’histoire !  En 2097, le monde vit en paix grâce à la technologie. Depuis une cinquantaine d’années, les Humains peuvent se balader partout dans le monde en une pression sur leur bracelet. Cette soudaine promiscuité a entraîné la disparition des frontières et conflits armés, tous les Humains parlant désormais la même langue. Et pourtant, dans ce cadre idyllique, un meurtre est commis. Enfin, un massacre même puisqu’une dizaine de retraités retirés sur une île privée sont massacrés. La paix et l’équilibre sont-ils menacés par cet attentat terroriste ? 

Ile paradisiaque

Un monde parfaitement réglementé

Michel Bussi nous propose un « et si » plutôt original et bien travaillé. Ce nouvel univers est réglementé de façon très précise. Si vous voulez aller à un endroit, ce n’est possible que s’il n’y a pas trop de monde. Ainsi certains lieux sont si prisés qu’il peut y avoir des listes d’attente. D’autres zones sont tabous et vous ne pouvez pas vous transporter chez quelqu’un sans y être invité. La liberté de circuler est grande mais ce n’est pas la foire non plus. L’univers proposé est cohérent, ce qui n’est pas toujours acquis dans les dystopies, et on se prend au jeu. Un univers où tu peux faire ton petit jogging le matin sur la Cordillère des Andes et te retrouver au bureau 5 minutes après avoir enfilé tes chaussettes, j’avoue que ça fait envie. 

Téléportation

Une fausse utopie assez classique

Après, Nouvelle Babel nous propose quelques ingrédients assez classiques des fausses utopies. Un pouvoir finalement autocratique géré par un président charismatique, des poches de résistances. Ici attachées à une culture ancestrale qu’ils refusent de voir dissous dans le grand maelström globaliste. Pour le coup, le sujet n’est pas anodin. Quelles sont les valeurs, les traditions qui perdureraient dans un monde qui n’a plus qu’un seul langage et a abandonné la notion même de pays. Sans parler de culture. Le monde est juste devenu un immense Disneyland où on peut visiter les merveilles du monde en une pression. Selon l’affluence certes. Mais on sent que la dimension mystique de certains lieux a vraiment disparu. Il faut voir pour cocher les cases, un peu. Fait amusant cependant, les « indépendantistes » de demain sont peu ou prou les mêmes qu’aujourd’hui, entre Indiens d’Amérique et Corses ou Palestiniens. 

Les pyramides d'Egypte

Une société avide de divertissements

Autre point important dans le roman : les médias et le spectaculaire. Comme dit précédemment, Nouvelle Babel est très tournée vers le divertissement. De nombreux spectacles semblent faire partie du programme comme la coupe du monde de football où des joueurs prennent les couleurs d’anciens pays. Et tout semble très scripté car la méchante Allemagne que l’on se doit de détester arrive loin dans la compétition. Oui, c’est écrit par un Français qui n’a sans doute toujours pas digéré la demi-finale de 1982… On a également un personnage journaliste un peu sulfureux qui fait des enquêtes qui ne vont pas forcément dans le sens du pouvoir. Mais si ses articles sont très lus, ça ne semble pas faire réagir particulièrement les gens. 

Lire le journal sans se sentir concernée

Où est passé l’Humanité ?

Après il y a quelques incongruités. Par exemple, tous les personnages principaux ont l’air de vivre dans des coins reculés, seuls, voire des lieux abandonnés. Pourquoi pas mais ils sont où tous les autres gens ? La population mondiale n’a pas diminué, c’est précisé donc où sont partis les gens qui ont abandonné certains coins ? Apparemment, apprécier le calme et la solitude est devenu plutôt une exception. Pourquoi pas mais… vu que tu te déplace en un clic, ne serait-il pas logique, au contraire, que les Humains se répandent dans les lieux plus déserts où ils pourraient avoir des maisons plus grandes plutôt que de s’entasser dans des lieux urbains ? 

Les villes fantômes de Chine

L’éternelle rengaine du « c’était mieux avant »

Autre défaut quasi inhérent aux grandes anticipations : la nostalgie pour notre temps présent. J’ai parlé de la coupe du monde de foot. Je ne comprends pas que ça n’ait pas évolué. Que le foot existe toujours, je l’admets tout à fait mais tu remplaces les pays par des couleurs voire des entreprises car on sait ce nouveau monde assez consumériste, ça passe. Idem pour les personnages qui ont beaucoup de réflexion sur le temps d’avant, celui où on ne se déplaçait pas comme ça, que ça devait être un peu mieux. Il y a même plusieurs scènes autour du musée des mobilités anciennes. Ohoh, c’est cocasse, le personnage ne sait pas faire du vélo et trouve ça bien compliqué ! Que l’usage du vélo se perde, je trouve ça discutable… Bah oui, le vélo, c’est pas juste un moyen de transport, c’est un loisir aussi. Je veux dire le héros principal va faire un jogging alors pourquoi personne ne prend plaisir à une petite balade en vélo sans but précis ? Mais OK, admettons.

Faire une balade en vélo

Etre nostalgique d’un temps que tu n’as pas connu ?

Mais surtout pourquoi tout le monde est nostalgique d’un temps qu’ils n’ont pas connus et s’emerveillent-ils épisodiquement de ce qui fait leur quotidien. Je veux dire, je ne pense pas tous les jours à mon accès à l’électricité… même si cet hiver, on va peut-être y repenser un peu. Pareil pour Internet. J’ai eu accès à Internet à 18 ans et je ne suis pas en permanence en train de penser à l’époque où je ne l’avais pas. Ou je ne philosophe pas 1h dès que j’envoie un mail ou un teams en me demandant comment on faisait avant. Je sais que c’est une façon simple de souligner les évolutions de la société vs notre présent mais quand même… de la subtilité ! 

De la nostalgie d'un temps qu'on n'a pas connu

Une coquille bien ouvragée

Bref, Nouvelle Babel est surtout la coquille d’un roman d’aventure matinée de polars sans les scènes où des gens discutent dans des avions entre les États-Unis et la Suisse. Oui, j’ai lu un roman d’aventure-espionnage récemment où les personnages gigotent beaucoup autour du monde et passent pas mal de temps en avion. Mais la coquille est quand même soignée et bien ouvragée avec un univers qui fonctionne. C’est pas forcément le roman de l’année mais j’ai aimé le questionnement sur un monde unilingue et sans frontières. Et les fausses utopies, j’aime toujours fort

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