Orange mécanique, la dystopie presque rédemptrice 

Dans un futur proche, une thérapie est mise en place pour guérir les pires criminels. Orange mécanique théorise la répression rédemptrice

Depuis la création de ce blog, il y a une dystopie sur laquelle je dois me pencher mais qui me rebute au plus haut point. Je n’ai certes pas vocation à traiter de toutes les dystopies, déjà parce que je ne pense pas que ce soit possible. Mais celle-ci a quand même un thème intéressant qui va servir de trame dans mon analyse : la répression rédemptrice. Étant farouchement allergique à la violence graphique, j’ai donc opté pour la version romanesque d’Orange mécanique. 

Orange mécanique

Des petites frappes en goguette

Dois-je raconter l’histoire d’Orange mécanique ? Dans le doute… Alex est une petite frappe. Avec ses amis, ils sillonnent la ville de nuit pour tromper l’ennui en commettant crimes et délits. Un peu comme les étoiles noires, ils agissent sans mobile et ça paraît bizarre. C’est peut-être parce qu’ils sont débiles… D’ailleurs, les étoiles noires de Starmania 2022 sont carrément plus dans cette énergie destructrice… Bref, Alex et ses amis font de sales coups. Lors d’un cambriolage qui tourne très mal, Alex est arrêté et se retrouve en prison. Il entre alors dans un programme expérimental de thérapie censé le rendre inoffensif.

Soigner les criminels

Une thérapie qui brise

Dans les dystopies, le volet répressif est souvent expéditif. Plus l’autoritarisme est fort, plus les rebelles sont exécutés de façon plus ou moins directe. On a quelques bribes de thérapie psychologique dans 1984 ou Brazil même si ça confère souvent à la torture. Et laisse les individus brisés ou carrément morts. Ici, cette thérapie est plus subtile dans sa cruauté. Car la rédemption a un coût. Si Alex développe une violente aversion envers la violence et le sexe, il devient incapable de se défendre quand il est passé à tabac à sa sortie de prison. Pire, il développe également une aversion pour la musique de Beethoven utilisée lors des séances alors qu’il en était fou avant. 

Ludwig Van Beethoven en statue

Que faire des mauvais citoyens

On en revient à la question centrale de nombreuses dystopies. Qu’est-ce qui définit l’être humain ? Cette annihilation des passions, surtout négatives, on l’a croisée dans Un bonheur insoutenable, Le passeur ou encore Community où la jeune héroïne est l’une des rares à écouter de la musique. Évidemment, ici, l’histoire est plus trash et radicale et elle angle la question différemment. Dans les fausses utopies précitées, l’apaisement chimique de la population était le gage d’une société apaisée, un nouvel âge de l’humanité. Ici, la question est plus de savoir que faire des mauvais citoyens. De ceux mal nés, qui ne pouvaient que mal finir ou à peu près. 

Les mauvais garçons de l'Orange mécanique

Une cruelle mise en abyme

Évidemment, on ne peut détacher Orange mécanique de son contexte d’écriture. Car il y a de la mise en abyme dans ce roman à travers le personnage de l’écrivain qui perd sa femme après que celle-ci ait été violée par Alex et ses amis. C’est peu ou prou l’histoire vécue par Anthony Burgess, l’auteur du roman. Sa première felle avait effectivement été violée et par 4 G. I. déserteurs. Dans le roman, l’écrivain comprend qui est Alex après l’avoir plus ou moins recueilli. Si Alex est, dans un premier temps, un moyen de mettre à mal le gouvernement, il finit par comprendre qui il est. Mais dans le roman, il restera relativement passif, rapidement neutralisé par ses comparses anti-gouvernement, vs le film où il tentera de pousser Alex au suicide pour se venger. Le roman est étrangement compatissant pour Alex et ressemble à un exercice de style, Burgess imaginant une thérapie punitive qui ne fonctionne in fine pas. Si Alex vit une sortie de prison particulièrement humiliante, se retrouvant confronté à ses anciennes victimes qui n’hésitent pas à le rouer de coups, la fin de l’histoire n’est pas si pire pour lui.

Orange Mécanique : Alex vs Alexander

Un argot du futur

Orange mécanique n’est pas toujours associé à la dystopie. Par exemple, il n’apparaît pas dans cette liste sur Wikipedia. Pourtant, si le Londres décrit dans le roman est peu ou prou celui que l’on connaît avec un cran de plus dans la pauvreté et le désespoir, Burgess a semé quelques éléments dans son roman qui ne laisse pas de place au doute : ce roman ne se passe pas aujourd’hui. Outre la thérapie punitive, il y a le langage, un mélange de russe et d’anglais. Qui rend la lecture assez compliquée par moment. Un argot typique de cette jeunesse futuriste.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *