J’aime bien quand les dystopies s’aventurent sur le terrain du sport, même si c’est relativement rare. Et pas toujours gage de qualité. Donc quand je croise une BD racontant une histoire de ballon prisonnier du futur, je prends sans réfléchir. Aujourd’hui, on va donc parler de Mécanique céleste de Merwan, volume 1 et 2. Les deux déjà sortis quoi.
Une terre agricole sous pression
L’histoire. Aster est une jeune marginale qui vit dans la cité de Pan, une société agricole spécialisée dans le riz. Amie avec Wallis, fils d’Eddy, l’autorité locale, elle est rejetée par les habitants de Pan car elle n’y est pas née. La vie de Pan s’écoule dans une paisible routine, nonobstant quelques attaques de pirate pour voler du riz. Mais un soir arrive un vaisseau rutilant de Fortuna, une région voisine qui propose sa protection à Pan… contre 25% de sa production de riz. Peu favorable à ce deal, Eddy demande à bénéficier de l’a justice l’arbitrage de la Mécanique céleste, sans trop savoir de quoi il s’agit. En gros : une partie de ballon prisonnier en trois manches sur trois terrains différents. Si Pan gagne, Fortuna les laisse tranquille. Sinon, ils devront fournir 50% de leur récolte de riz.
Un talent inné pour le ballon prisonnier
Les premiers entraînements ont lieu sous la direction de Juba, le fils prodigue réapparu pile à ce moment-là. Qui dit dystopie dit Elu la plupart du temps. Et dans cet univers, qu’a-t-on ? Une jeune femme marginalisée, considérée comme différente car trouvée un beau matin dans un berceau donc une “Extra-Pan”. Un petit côté Moïse… Bref, c’est classique : l’Elue est une marginale à qui personne n’a envie de faire confiance mais en cas de crise, y a moyen le choix. Et effectivement, Aster devient rapidement la coqueluche du public et des médias sur le terrain grâce à son don inné pour la mécanique céleste. Sans oublier une petite dose de facétie qui la rendent irrésistible.
Un jeu peu équitable
Sauf que Fortuna n’est pas du genre fair play. Tel le mafieux qui veut soumettre les commerçants ou un Negan qui terrorise les populations alentours pour leur prélever une part de leur production, Fortuna va profiter de sa supériorité pour… tricher. Et pas qu’un peu. Si le premier match a lieu dans les règles sur un terrain neutre, les parties suivantes vont se dérouler sur des terrains de plus en plus hostiles pour Pan. Notamment une partie sous la neige. Ici, on se retrouve dans un univers très similaire à Hunger Games, les morts en moins. Oui, personne ne meurt dans La mécanique céleste, c’est juste une partie un peu vénère de ballon prisonnier. Les parties sont filmées et diffusées en direct donc il faut du spectaculaire. Et certains clans, ici Fortuna, sont nettement privilégiés.
Une terre polluée
La dernière épreuve a lieu à la frontière de Pan, dans des zones contaminées. Un autre classique des dystopies qui barbotent dans une ambiance post-apo. On retrouve ça dans Niourk, Chroniques du Pays des mères… Fait intéressant : l’action se passe à l’orée de la forêt de Fontainebleau, on reconnaît dans cette zone contaminée une architecture toute française. Même si Merwan a la délicatesse de nous épargner le plan quelque peu putassier et un peu lointain d’une Tour Eiffel en mauvaise posture. Si la dimension écologique n’est pas clairement énoncée, elle reste présente en filigrane, avec cette ville française à moitié immergée. D’ailleurs, Mécanique Céleste a un petit côté Waterworld avec la présence importante de l’eau et ses pirates. Des pirates beaucoup moins goofy que le film de Costner, au passage, gros plus.
Une inégalité technologique
Le volume 1 raconte donc la sympathique histoire de cette équipe de ballon prisonnier. On y retrouve pas mal d’ingrédients classiques de dystopies mais c’est bien géré. Les personnages sont sympas, le rythme est bon, le dessin propre. Mention spéciale à cette ville française inondée qui m’a particulièrement plu. La fin laisse supposer un one shot. Mais voilà le volume 2 et là… On embrasse à pleine bouche la récession technologique qu’a connu le monde. Si on ne sait pas grand chose de la technologie de cet univers dans le 1, le 2 vient nous éclairer. En gros, la technologie, c’est Fortuna et c’est tout. On s’en doutait dans le volume 1 avec Pan qui ne possède guère qu’un téléviseur pour toute la communauté alors que Fortuna envoie des drones. Un objet totalement inconnu à Pan. Le 2 nous amène à la Source, une sorte d’usine abandonnée où les autorités de Fortuna traque nos héros pour trouver… une disquette.
Une saga imprévue ?
Et je suis un peu embêtée. Le 1 étais vraiment pensé comme un stand alone et quand le 2 démarre, on comprend qu’on est littéralement cinq minutes après la fin du match de ballon prisonnier et que cette aventure n’était initialement pas prévue. Alors pourquoi pas ? Les personnages sont sympathiques, l’univers intrigant et je ne doute pas qu’il y a de quoi raconter. Mais j’ai un peu moins accroché. Je l’ai trouvé moins subtil que le premier, les personnages moins attachants. Et cette sensation d’un auteur qui doit rajouter des péripéties qui n’étaient initialement pas prévues. Et j’ai senti un peu la couture. Il manquait la fraicheur agréable du tome 1.
En attendant le tome 3…
Ça ne m’empêchera pas de lire le tome suivant quand il sortira. Cependant, vu que le tome 2 est sorti en octobre dernier, je vais prendre mon mal en patience. Heureusement, d’autres BD m’attendent. Notamment le tome 4 de Bolchoï Arena qui ne devrait plus tarder. J’espère…