Junk Head, une dystopie souterraine… et totalement barrée

Il y a des dystopies très classiques et il y a un Junk Head, film en stop motion japonais foutraque, bien plus profond qu’il n’y paraît.

Etant fort peu cinéphile, je me préoccupe des sorties cinés une fois tous les trois mois environ. Et je découvre totalement par hasard que l’Utopia de ma ville diffuse une dystopie japonaise qualifiée de “OFNI”. Objet filmique non identifié. Voyons voir… Junk Head, film en stop motion, japonais, dystopique, petit robot kawai… Ca mérite bien de braver la canicule pour le découvrir ! 

Junk Head

Une humanité désormais immortelle…

L’histoire.  Dans un futur lointain, l’humanité a évolué à grand coup de manipulation génétique et est désormais immortelle. Cependant, en contrepartie, elle a perdu la capacité de se reproduire. Dans sa folie créatrice, elle a également inventé les Marigans, créatures des profondeurs censées exploiter le sol pour eux. Mais ceux-ci finissent par se rebeller et prendre possession des sous-sols de la ville. Parton est donc envoyé dans les antres de la ville pour étudier les Marigans.

L'immensité de la ville dans Junk head

Des souterrains effrayants

Lors de sa descente vertigineuse, il est attaqué par les Marigans qui font exploser sa fusée. Seule la tête de notre héros est retrouvé et un savant fou transfère l’âme de Parton dans un robot un peu rouillé. Celui-ci va donc partir explorer les sous-sols en compagnie d’étranges compagnons, chaque mésaventure l’entraînant toujours plus bas. Car les souterrains sont peuplés de créatures voraces qui n’hésiteront pas à dévorer tout voyageur imprudent.

Les Mardigans, terrifiants

Un travail incroyable en stop-motion

Ce film est déjà assez compliqué à résumer en soi vu que c’est bien foutraque. Junk Head est plus emballé comme une prouesse technologique que comme un film narratif. Je m’arrête quelques instants là-dessus. Le film a nécessité 140 000 prises de vue, pour respecter la fluidité d’un 24 images/seconde. Soit 7 ans de réalisation… dont 4 où Takahide Hori a travaillé seul. C’est colossal. Mais derrière ce travail titanesque, cette esthétique cyberpunk et un certain amour pour les créatures bizarres et franchement peu ragoûtantes pour la plupart, on retrouve de vrais thèmes dystopiques comme je les aime.

L'arbre de vie façon Takahide Hori

Le travail sans savoir pourquoi

Tout d’abord l’absurdité du travail dans le futur. Il y a un côté Les temps modernes dans Junk Head. A un moment, Parton échoue dans une sorte d’usine dont on ne comprend pas bien l’utilité… pas plus que les ouvriers qui y travaillent. On apprend qu’il faut surveiller des tuyaux qui ont tendance à s’emballer et si on n’agit pas à temps, ça explose. Ce n’est que bien plus tard qu’on découvrira ce qu’il se passe à l’origine des tuyaux… sans que l’on sache vraiment à quoi tout cela sert. La plupart des entités intelligentes des sous-sols s’adonnent à des routines sans réel but. Certaines ressemblent même à des robots, comme le groom de l’ascenseur. On est pas loin des Shadocks version cyberpunk. Et puis évidemment, la pénibilité du travail suppure à travers le synopsis : l’Humain ne veut plus travailler et file les basses besognes à des créatures… qui finissent par se rebeller.

Les Madigans

Une âme humaine dans un tas de tôle

Ensuite, on a la question de l’humanité. Qu’est-ce qu’un humain ? Ma question préférée des dystopies, oui. On en sait assez peu sur la vie à la surface. On voit le visage original de Parton puis un flash-back de sa vie eeeeeeeeet… Je vous cache pas que cette immortalité-là, elle fait pas rêver. Les corps sont dégradés, les yeux de Parton semblent recouverts du voile de la cataracte. D’ailleurs, s’habiller dans le futur, c’est revêtir une sorte d’armure vous donnant des traits humanoïdes et sa seule interaction se fera en virtuel. Vivre pour toujours sans vivre ? D’ailleurs, ce corps immortel sera vite éliminé de l’intrigue puisque l’âme ou la conscience de Parton naviguera dans plusieurs corps robotiques durant le film. Bien malgré lui à chaque fois.

Humans in the Future

Les Humains jouent aux Dieux

En parallèle, il y a également la question de l’Humain créateur de vie. Le pitch de départ fait furieusement penser à Blade Runner : des clones créés pour faire des tâches que l’Humain ne veut plus faire et qui finissent par se rebeller. D’ailleurs, les Minions locaux prennent Parton pour un Dieu, celui qui les a créés. Pourtant, la création a dépassé le maître. Un peu comme dans Terminator, oui. Car la réelle quête de Parton, c’est de trouver comment les Marigans se reproduisent pour redonner cette fonction à l’Humain. Partant en quête d’une créature à la queue furieusement phallique, il va découvrir le système de reproduction des Marigans… Que j’ai trouvé très poétique. Assez étrange dans cet univers fou. Système de reproduction qui semble être en danger, la créature a repris tous les travers de son créateur.

Junk-Head un délire avec un fond d'émotion

Des références réelles… ou chacun y voit ce qu’il veut ?

Les références de Hori sont nombreuses. On a droit à une cité gigantesque sortie tout droit de Métropolis, le côté mécanique et poussiéreux du travail peut aussi évoquer Brazil. Et d’un point de vue esthétique, l’un des corps de Parton, ce petit robot tout rond, n’est pas sans rappeler Wall-E. Car j’ai parfois eu l’impression qu’Hori s’amusait à se moquer un peu des personnages d’animation Minions,  notamment avec sa propre vision des Minions, des créatures caoutchouteuses un peu pataudes. Le groom de l’ascenseur a un côté très Mad Max Fury Road, aussi…

Junk-Head et ses inspirations

Un film un peu imparfait mais à découvrir

Bref, derrière ses airs foutraques, Junk Head n’est pas qu’un pur délire de son créateur, il offre quelques bons éclats de rire et quelques jolies scènes. Le côté self made lui confère également quelques longueurs, notamment la quête de champignons organiques parfaitement dégueus. Mais on lui pardonne grâce à la fin qui offre de belles émotions. J’ai lu que le film devait être le premier d’une trilogie. Pour moi, il se suffit à lui-même même si, effectivement, j’ai bien identifié les graines semées pour une suite. Si vous avez envie de découvrir l’univers de Hori, je vous renvoie sur la chaîne Youtube de son créateur… qui me donne furieusement envie de me lancer dans le modélisme (envie que j’ai depuis trop d’années)

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