Je suis toujours circonspecte face aux dystopies françaises qui sonnent toujours un peu faux. Trop l’amour des punchlines, des néons et du béton. Cependant, en jetant un oeil sur Ares, je découvre un Paris nocturne, dans le plus pur respect du ciel disparu des dystopies. Un Paris sombre, sale, bourré d’écrans publicitaires défigurant la ville et même la Tour Eiffel. Ok, j’achète direct.
La France rongée par la misère
Mais Arès, ce n’est pas l’histoire d’un panneau publicitaire géant sur la Tour Eiffel. Non, c’est l’histoire d’une France frappée par une crise économique massive et un chômage très élevé. Le peuple gronde et l’Etat a été peu à peu racheté par des entreprises privées. Dans ce climat tendu, la télé organise des combats très violents où les combattants ont le droit d’être dopés. On suit les aventures d’Arès, un ancien combattant qui survit comme il peut. Tout bascule le jour où sa soeur se fait arrêter sur de fausses accusations. Pour la libérer et la rendre à ses deux filles, il doit trouver beaucoup mais alors beaucoup d’argent. Il se retrouve à devoir renfiler les gants de boxe, dopé par un nouveau produit révolutionnaire mis au point par un vilain laboratoire.
Vilaines corporations inhumaines
Alors vous l’aurez compris à la fin de mon dernier paragraphe, ce film ne va pas nous épargner quelques poncifs. C’est peut-être un truc des dystopies à la française mais on aime les vilaines corporations inhumaines qui n’hésitent pas à exploiter les plus faibles pour son profit. Je pense naturellement à Trepalium mais, dans un genre non dystopique. Ou Dérapages, une série Arte, actuellement disponible. Je vous la recommande très chaudement pour retrouver un Eric Cantona au poil… mais surtout un Alex Lutz absolument glaçant. Jusque là, je n’avais pas vraiment d’avis sur Alex Lutz mais désormais, je le trouve sous-côté et surtout très mal employé dans des productions comiques alors qu’il est excellent dans le rôle de l’atroce PDG manipulateur et inhumain. Je m’égare. Bref, on baigne dans pas mal de clichés : la froide corporation, la nuit, les écrans géants, la tour immense de ladite corporation et des personnages pauvres plein d’humanité. En gros.
Des petites filles pas très utiles
La dichotomie entre la froide corporation et la famille d’Ares va guider toute la narration. Entre deux combats, on a droit à quelques scènes familiales un peu tendres avec ses nièces et la voisine trans qui garde les petites quand Ares va combattre qui répond au doux nom de Myosotis. Au coeur de cette capitale hyperurbanisé, choisir le nom de cette délicate fleur bleue ne me paraît pas anodin. A noter cependant que je ne trouve pas forcément les nièces très bien exploitées. Anouk, l’aînée, semble frayer avec la révolution et se met parfois en danger mais grosso modo, à part nous offrir quelques respirations dans le film et peut-être grapiller quelques minutes à droite, à gauche, elles ne sont pas particulièrement utiles.
Ainsi gronde la révolte
Mais Ares ne raconte pas simplement cette histoire de pauvreté, de sacrifier son corps pour permettre à sa famille de s’en sortir. En filigrane, il y a aussi la révolte comme je disais. La colère gronde dès le début du film. Les pauvres en sont réduits à vendre leur corps aux entreprises pharmaceutiques pour survivre. Un peu comme dans Maniac, finalement mais sans l’esthétique rose et rétro. La soeur d’Ares, Anna, est soupçonnée de faire partie de la révolution, d’où son arrestation arbitraire. Evidemment, la révolte d’Ares qui va porter sa colère jusqu’au sommet de la Tour Donevia, l’entreprise pharmaceutique diabolique, va entraîner l’embrasement dans les rues de Paris.
Un joli exploit au vu du budget
Alors concrètement, Arès ? Et bien, c’est pas si mal, surtout si on prend en considération le budget, loin d’un Besson. Même si le propos est très manichéen et pas très subtil, ça marche pas mal et je considère que le film ne vaut que pour ce Paris post effondrement étatique, délabré, poisseux, visiblement inspiré du Blade Runner de Ridley Scott. Mon seul regret est que, finalement, je ne trouve pas le film très creusé malgré ses pistes prometteuses, notamment le commerce des corps comme on peut le voir dans Ultimate Game, par exemple. Le côté très monolithique et peu expressif d’Arès nous fait parfois un peu manquer d’empathie pour lui. Un défaut assez récurrent sur les personnages durs. L’ultra violence n’est pas sans rappeler un Battle Royale ou un Hunger Games. L’individu n’est plus que chair à canon qui permet de calmer les velléités d’une population exsangue, repue de violence. Et sert les intérêts d’une puissance quelconque soit en lui garantissant une source de revenus, soit en rappelant au peuple pourquoi il doit rester soumis.
On veut plus de SF française !
Bref, Arès est actuellement disponible sur Netflix actuellement, ne passez pas après. Ne serait-ce que parce que je suis persuadée que le cinéma français de science-fiction mérite mieux que ce que l’on a actuellement, prouvons qu’il y a un public.