Vega, la dystopie résolument pop

Serge Lehman n’écrit pas que des romans. Il écrit aussi des BD dont Vega, une BD dystopique à l’esthétique pop

Et si je continuais sur ma lancée Serge Lehman ? Aujourd’hui, on repart sur de la BD avec Vega, une petite bande-dessinée que j’ai lue y a quelques mois et que j’avais un peu oubliée. Jusqu’à ce que je fasse la recherche icono pour l’article sur F.A.U.S.T et que je vois apparaître la couverture de Vega car c’est écrit par Serge Lehman. Et illustré par Yann Legendre qui réalise un très beau travail. Car je vais vous avouer que ce qui m’a attirée en premier dans cette BD, c’est sa couverture très colorée et cet encrage très noir. Mais est-ce que le ramage se rapporte au plumage ?

Vega, BD  de Serge Lehman

L’histoire. 2060, le monde est en piteux état. Le réchauffement climatique a décimé de nombreuses espèces animales et les mafias diverses font régner leur loi. Ann Vega est une scientifique anthropologue qui a pour projet de recréer une arche de Noé en orbite. Quand elle entend parler d’une femelle orang-outang repérée dans une forêt indonésienne, elle dépêche une équipe pour vite la récupérer. Ce qui n’est pas du goût d’Alter-Pongo, un groupuscule prônant le clonage des espèces en voie de disparition. Et donc très intéressée par la prise d’Ann.  Entre pression politique, expériences scientifiques et attentats, la vie d’Ann va basculer.

Sauver le orang-outang

Vega est à peu près à l’antithèse de F.A.U.S.T puisqu’ici, l’histoire tient en une centaine de pages. D’autant que le dessin se permet quelques fantaisies, on n’est pas dans de la sage case de BD. L’action va donc droit au but et c’est la principale faiblesse de la BD qui manque parfois de nuances dans les décisions et opinions des protagonistes. Car Vega, sous couvert d’aventure, réfléchit à un monde en perdition et nous expose quelques possibilités à explorer. Pour les animaux, par exemple, soit on les éloigne de cette humanité mortifère, soit on les clone. 

Vega de Serge Lehman et Yann Legendre

C’est la dichotomie assez classique sur ce sujet : choisir la vie ou la science. Le choix de Ann est relativement conservateur : laisser des animaux être des animaux dans un environnement qui leur correspond. Bon, ok, faut les envoyer dans l’espace pour ça et Ann travaille sur un projet de téléportation mais sa vision est, en soi, assez défaitiste. Les humains ont massacré les animaux, on ne retournera pas à l’opulence. Même si elle envisage une fécondation in-vitro pour faire repartir l’espèce. Contrairement à la vision d’Alter-Pongo, qui considère les animaux comme des frères. Cependant, le groupe a des visions assez particulière puisqu’ils n’envisagent pas un simple clonage mais une sorte de mix génétique pour ajouter de l’humain aux animaux et créer des espèces hybrides.

Vega, Ann et sa fille

La technologie occupe une place de choix dans cette BD. Comme dans F.A.U.S.T, elle n’est pas diabolisée. Elle ne sauvera pas le monde mais les personnages vivent avec elles et essaient de limiter les dégâts grâce à elle. Ann connaîtra même une sorte de transhumanisme suite à un accident de labo. Mais même si la technologie est omniprésente, Vega se concentre sur les liens entre les personnages, notamment entre Ann et Java, l’orang-outang, ou même les liens de notre scientifique avec un robot domotique. C’est ici la quintessence de Vega, finalement : sous la couche de technologie et de gadgets, reste les liens entre les individus.

Ann dans Vega

En marge, on va retrouver la question de la politique, minée par des puissances autres comme mafias, triades mais aussi conglomérats. Un thème que l’on avait déjà dans F.A.U.S.T mais qui résonne ici particulièrement puisque la quête, à priori noble, d’Ann se heurte à des intérêts politico-financiers qui la dépassent. Et qui ne semblent pas du tout l’intéresser au demeurant. Elle, elle veut sauver Java et c’est tout. Même si elle ne peut ignorer les menaces qui planent, sa famille en payant d’ailleurs les frais, elle essaie de rester focus sur son projet. Quitte à tout perdre.

Vega, une ville du futur

Bref, Vega est un bel objet avant tout. J’ai beaucoup aimé l’ambiance graphique même si j’avais l’impression qu’Ann était un décalque de Nora Hawzaoui. Que j’aime beaucoup, faut pas croire, mais que je n’ai jamais imaginée en anthropologue du futur. Vega est très beau. Après, format BD oblige, je trouve que la BD prend parfois quelques raccourcis et j’aurais aimé que deux ou trois points soient un peu approfondis. Mais je chipote pas mal car le fond reste intéressant et, une fois de plus, on sent le travail d’un amoureux de la SF qui ne s’interdit rien. 

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