Dans les sociétés cauchemardesques, les dirigeants manient avec talent le fameux quatrième pouvoir. Vous allez me dire que dans la “vraie vie” aussi… Et c’est pas faux mais ici, on parle dystopie donc restons concentrés sur notre sujet. Dans la panoplie du tyran, outre un manque total d’empathie, on trouve souvent cette main mise sur les médias. Notamment via la télé. Du montage vidéo à la réécriture de l’histoire en passant par la téléréalité sanguinaire, comment les auteurs et autrices de dystopies essaient de nous prévenir des dangers du contrôle de l’information.
Le quatrième pouvoir totalement corrompu
Dans la vie d’aujourd’hui, le traitement de l’information interroge. Est-ce que le quatrième pouvoir ne serait pas un peu corrompu jusqu’à la moelle ? Ahah, toujours prompt à défendre les intérêts de la bourgeoisie qui font manger les journalistes ! Alors sur cette question, je vous renvoie à l’épisode du Vortex qui, traitant des faits divers, nous brosse un portrait tout en nuance de la presse et de certains de ses travers. Notamment la surmédiatisation des faits divers. Mais pourquoi a-t-on si peu foi dans nos médias, tous à la solde de l’intérêt inverse au nôtre ? Tout simplement parce qu’on a l’intuition que diriger le peuple dans le bon sens est la meilleure façon pour un despote de le maintenir sous son joug. Et aussi parce qu’on a tous bien appris qu’en dictature, le contrôle des médias était clé. Du cinéma nazi à la Pravda, on apprend tout ça dès le collège. Alors forcément, si on veut écrire une dystopie de type politique, on est obligés d’imaginer une manipulation médiatique à grande échelle.
Divertir pour gouverner
Souvent, la manipulation passe par le divertissement, façon Battle Royale ou Hunger Games. Ou le fameux épisode de Black Mirror sur la télé-réalité comme ascenseur social. Ces événements prenant la une, on ne parle pas d’éventuelles contestations. Dans Hunger Games, les médias diffusent régulièrement la propagande officielle, notamment en diffusant des images du secteur 13 totalement ravagé pour dissuader le peuple de se rebeller. Sinon…
Créer des drames pour animer la séquence médiatique
Parfois, la manipulation de la presse se fait par des dirigeants qui pilotent des terroristes qui ne savent pas qui tire réellement les ficelles derrière. C’est l’histoire de Starmania, selon certaines interprétations. On peut considérer que Sadia a toujours été un agent infiltré de Zéro Janvier. C’est un peu le sous-texte de Corpus X, également. C’est le terreau de beaucoup de théories du complot, aujourd’hui, d’ailleurs. Derrière chaque drame “vu à la télé”, on soupçonne une manipulation. Comme le plus fameux d’entre eux, le 11 septembre.
L’éternelle réécriture du roman national
Mais il y a également toute l’écriture du roman national et de la personnalité du dirigeant. Dans 1984, on réécrit l’histoire pour la faire coller au récit officiel. Idem dans le roman Battle Royale où le parti nazi au pouvoir fait croire qu’il est là depuis toujours. Dans Les puissants, les familles dirigeantes se mettent en scène dans une imagerie copiée-collée de la famille royale britannique, coucous de la main à partir d’un grand balcon inclus. Dans les Puissants comme dans Nous, la vague, qui n’est pas une dystopie mais en récupère pas mal de codes, l’impact des images est une stratégie de pouvoir ou de résistance. La scène du procès télévisé dans La zone du dehors répond exactement à la même logique. Pour convaincre le peuple de la culpabilité de Captn, on drogue celui-ci pour qu’il soit incapable de se défendre pendant son procès.
C’est de là que vient la faille
Pourtant, le contrôle médiatique n’est pas si parfait. Il existe des failles. Dans Hunger Games, la télé est l’élément qui permet à la résistance de remarquer que les images du secteur 13 sont toujours les mêmes, c’est donc suspect. La télé sera ensuite piratée par les résistants pour diffuser leur message. Tout comme dans la série Dark Angel avec le veilleur, sorte de lanceur d’alerte. Quand on écrit une dystopie de type politique, le parasitage des médias officiels est un indispensable. Parce que finalement, peu importe ce que racontent les médias, on croira toujours plus facilement les voix hors système. Pas celles des lanceurs d’alerte, non. Celles de ceux qui racontent des histoires folles de complot mondial.
Garder le peuple dans le rang
Bref, si vous voulez écrire une dystopie politique, vous devez intégrer cet ingrédient car on ne peut imaginer un pouvoir autoritaire sans leviers pour garder son peuple dans le rang. A grand coup de propagande ou de légendes urbaines savamment entretenues. Sauf qu’en vérité, c’est une arme à double tranchant…