Les dystopies étant généralement le reflet de leur époque, je croise de temps en temps des ouvrages ou films traitant d’une société hautement capitaliste. Parfois jusqu’à l’effondrement. Caricature parfois un peu grotesque de notre société actuelle, elle en souligne les pires travers. Dans Bonheur ™, nom rigolo pour une dystopie qui, par définition, décrit une société dans laquelle les citoyens n’ont aucun moyen de parvenir au bonheur, on va parler hyperconsommation. On n’est pas loin de la partie de Sonmi dans Cloud Atlas… mais en vraiment moins bien.
Une expérience littéraire atroce
Alors avant de poursuivre, je vais être honnête. Je n’ai pas terminé ce livre. Je l’ai même à peine commencé et très vite abandonné. Le style littéraire est d’une pauvreté remarquable et surtout, l’auteur a quelques obsessions sexuelles qu’il pourrait régler avec son psy plutôt que de nous les imposer. J’ai lâché l’histoire peu après une trop longue scène de viol d’un droïde. En tant que femme, j’aimerais vraiment que les auteurs mâles, car ce sont souvent ceux qui pondent ça, arrêtent de nous détailler ces atrocités. Et ce livre, je l’ai écouté. Donc pour que la médiocrité du style me frappe, il fallait que ce soit assez manifeste. Paraît que c’était fait exprès… Tout comme des dizaines de copier/coller disséminés dans le roman. J’ai économisé 6 heures de ma vie en arrêtant au bout de la première heure… Le monde de l’édition échappera toujours un peu à ma compréhension mais poursuivons.
Une bonne idée néanmoins
Si je me permets d’écrire cet article sur un roman abandonné, c’est pas juste pour le défoncer mais parce que je suis allée voir les avis et qu’apparemment, il ne se passe rien de particulier dans ce roman. Juste une longue description d’un monde qui a érigé la consommation en seule règle de vie. Et donc quelques scènes de viol et de personnages en latex et boule dans la bouche. Gros soupirs. Et si c’est extrêmement mal écrit, l’idée me paraît néanmoins intéressante car elle nous renseigne une nouvelle fois sur ce qui inquiète nos contemporains. La dystopie n’est que le grossissement parfois ridicule d’un trait de société qui nous inquiète, donc. Et le consumérisme à outrance est un bon sujet. Je l’ai d’ailleurs retrouvé dans une autre dystopie, Les Mandibles, dont je vous reparlerai prochainement.
Consommer est obligatoire
Donc quelle est la société décrite par Bonheur ™ ? On est dans un futur cyberpunk avec une société saturée d’hologrammes publicitaires et d’androïdes car il n’y a plus qu’une seule règle : consommer à tout prix. Les citoyens n’ont pas le droit de faire des économies, d’épargner. Il faut consommer et tout de suite. Le personnage que l’on suit est donc une sorte de policier dans la brigade de la consommation et va contrôler les gens qui n’ont pas suffisamment consommé directement. Alors que lui-même est mauvais élève car, en vérité, il n’a pas le temps de consommer tellement il est occupé à travailler. Cet ultra-consumérisme se matine de libertarisme. Puisqu’il faut dépenser tout son argent, les citoyens se lancent dans les plus grands délires. On découvre ainsi que certains humains se lancent dans la grande aventure du transhumanisme. L’un d’entre eux se transforme en vampire… et se dote d’esclaves tout en latex et boule dans la bouche parce qu’apparemment, ça fait partie de la panoplie.
Marques omniprésentes
On découvre aussi quelques éléments de cette nouvelle société. Les talk shows sont diffusés absolument partout jusque dans les ascenseurs, Minute Girl, jeune femme dotée de trois seins, interroge un scientifique lambda sur le plaisir procuré par un double pénis. J’en peux plus… Les personnages sont aussi tous sponsorisés par des marques et en portent donc le nom, le “héros” s’appelle donc Toshiba, son collègue Walmart. Je n’ai pas compris précisément comment s’incarnait ce sponsoring mais il m’évoque Cloud Atlas où certaines marques sont devenus des noms communs.
La « subversivité » ne devrait plus être un argument-vente
Bref, une idée géniale complètement ruinée par les obsessions de son auteur. Il voulait sans doute nous pondre une dystopie dans la veine de Bret Easton Ellis. Et comme BEE, Baret récolte des critiques élogieuses alors que je les trouve aussi mauvais l’un que l’autre. On n’a pas le droit à une vraie intrigue, juste de longs passages collés les uns aux autres pour faire patienter le lecteur entre deux scènes osées plus ou moins subversives. Mais au moins, Ellis avait un certain style, du moins dans mon souvenir. Bref, une bonne idée gâchée. Et j’aimerais assez qu’on arrête d’ériger les violences faites aux femmes comme un signe d’une quelconque subversion ou d’une audace littéraire. Ce roman fait réfléchir au consumérisme ? Mais contentez-vous d’ouvrir un journal, il y a mille histoires vraies qui vous feront réfléchir tout autant. Sans se prendre dans les dents une scène de sodomie non consentie. Subversif, prout.
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