Un film d’animation avec un robot en personnage principal ? Wall-E. Un film d’animation avec plein d’animaux dont un renard filou en star ? Zootopia. Un film d’animation avec un écureuil qui ramasse des glands ? L’âge de glace. Bref, sur le papier, Le robot sauvage avait des airs de déjà-vu. Cependant, je voyais des gens en parler sur les réseaux, et tout le monde semblait très ému par ce film. Je n’aime pas particulièrement pleurer au cinéma. Mais le film était diffusé dans mon ciné de quartier le 01 novembre donc pourquoi pas ? Et j’ai bien fait parce que c’était vraiment touchant. Et drôle, aussi.
Un robot perdu dans la pampa
L’histoire. Suite à un typhon, un robot intelligent se réveille dans une forêt pleine d’animaux. Confus, Rozzum 7134, le robot, essaie de trouver qui peut être son propriétaire. Courant après tous les êtres vivants qu’il croise pour essayer de leur rendre service, Rozzum sème le chaos. Après une période de veille lui permettant d’apprendre le langage des animaux, Roz reprend sa quête. Alors qu’il cherche à échapper à un ours, il s’écrase dans un arbre et tue une oie qui nichait avec ses oeufs. Il récupère l’oeuf survivant et rapidement, il se retrouve à élever un bébé oie avec l’aide d’Escobar, un renard filou.
Un aperçu du futur
Le film va donc raconter son histoire sur trois axes : l’identité, les familles recomposées et l’amour. Je ne vais pas m’étendre sur les deux premiers. Je vais rester un peu sur le dernier et élargir à ce que l’on sait de cet univers car on va découvrir une société futuriste. Exposée en petites touches donc j’ai envie de vous parler de ce que j’ai vu. Mais aussi de ce que je suppose.
Un robot en constant apprentissage
Pour commencer, on va parler robot puisque c’est quand même le personnage principal. Rozzum 7134, dit Roz, a des capacités réellement étonnantes. Outre une infinité de trappes et de gadgets qui semblent obéir aux besoins du scénario, Rozzum agit également grâce à une IA particulièrement efficace. Dans les premières minutes, on s’amuse de l’incongruité d’une machine qui ne semble pas comprendre qu’elle s’adresse à des êtres qui n’ont pas besoin de ses services. Ce court passage va nous permettre de comprendre que Rozzum est une sorte de robot domestique qui peut réaliser toute sortes de tâches physiques ou intellectuelles. Un peu comme les Experts dans la trilogie baryonique ou les bots dans Real Humans. Même si Roz’ n’est pas humanoïde. Mais ce robot inclut une possibilité d’évolution. Ne parvenant pas à communiquer avec les animaux, le robot se met en mode apprentissage pour décrypter leur langage. Les capacités d’apprentissage et d’adaptabilité du Rozzum sont d’ailleurs montrées dès la première scène quand elle imite un crabe pour éviter une grosse vague.
Des bouleversements du climat esquissés en arrière-plan
A partir du moment où une IA peut apprendre et évoluer, peut-elle penser par elle-même ? Si ce questionnement n’est pas explicite dans le film, la singularité de Roz est effectivement un élément déterminant pour l’une des péripéties du film. Le monde extérieur à la forêt va apparaître en deux occasions. La première, c’est lors de la migration des oies. Leur survol va nous permettre de découvrir le Golden Gate immergé et une cité futuriste au loin. On comprend facilement que le réchauffement climatique a changé la donne avec une montée des eaux assez massive. Le film ne donnera aucune explication sur les bouleversements climatiques, il sera question d’un terrible hiver également. C’est juste posé là. Un peu comme dans Réminiscence. Le bouleversement climatique n’est pas tant un sujet qu’une toile de fond.
Une société parfaitement réglée
On va également découvrir une ville futuriste. Enfin, on va surtout visiter une ferme située dans ses alentours. Dans ces immenses champs, les oies vont se retrouver nez à nez avec des robots de type Rozzum. Ceux-ci ne sont pas programmés pour être des robots domestiques mais des travailleurs, collectant fruits et légumes. L’oie élevée par Roz ne voit donc pas le danger et va interpeller les robots, semant la panique à la ferme. Cette nouvelle société dont on sait peu ne semble pas apprécier le moindre grain dans la machine et les oies sont méchamment chassées des champs.
Une entreprise sans coeur et sans âme
D’ailleurs, le véritable méchant de l’histoire, c’est Universal Dynamics, la société qui a créé Roz et qui ne considère ses robots que comme des unités corvéables et réutilisables à merci. Si Roz semble avoir acquis un statut particulier du fait des connaissances qu’elle a engrangé en vivant en forêt, elle reste perçu comme une ressource et la société souhaite la récupérer. Pour comprendre comment elle a évolué mais aussi pour la réaffecter. Money is money. Le film nous présente quelques antagonistes à travers des animaux cruels et effrayants tel l’ours ou un brochet qui n’est pas sans rappeler Merlin l’enchanteur. Même le roublard Escobar est surtout motivé à l’idée de manger le bébé oie, au début du film. Il nous explique d’ailleurs toute la logique de proie et prédateur, que c’est la loi de la nature. Alors qu’Universal Dynamics n’agit pas pour sa survie, juste pour son profit.
Nature vs technologie
Il y a une dichotomie très forte dans le film entre la nature et la technologie. Les Humains ne sont pas tant représentés comme des êtres cruels. On ne les voit que très peu et le seul plan clair sur l’une d’entre elles nous montre un visage plutôt ouvert et souriant, elle travaille en bonne collaboration avec des Rozzum. Les méchants seraient plus les capitalistes d’Universal Dynamic, si implacables et froids qu’ils sont représentés par un étrange robot méduse déterminé récupérer Roz, quitte à totalement piétiner la nature. Il y a un fond de Princesse Mononoké par ici. Le peu d’humanité que l’on voit vit dans une sorte de cité du futur où les ressources naturelles sont tirées de fermes futuristes protégées par des dômes et où la présence d’animaux est littéralement perçue comme une contamination.
S’inspirer d’une nature oubliée
Ici, j’extrapole mais je ne peux m’empêcher de voir un discours naturaliste fort dans ce film avec notamment, une mise en parallèle des dômes. Celui créé dans la nature d’abord par un castor grincheux puis imité par Roz pour créer un foyer pour Escobar, Joli Bec et elle. Plus tard, on découvre donc que les fermes de la ville sont abritées sous des dômes technologiques pour maximiser leur rendement. Ou alors, ce dôme est là parce que les dômes, c’est futuriste. Et c’est une passionnée des dystopies sous cloche qui vous dit ça. Une forme inspirée par la nature et exploitée par une Humanité qui a oublié ce qu’était la nature. J’ai également une hypothèse que je pose là : les quelques Humains que l’on aperçoit sont de sexe féminin, les quelques robots que l’on croise ont des voix féminines. Serait-on dans une société matriarcale façon Chroniques du pays des mères où les individus mêles auraient disparu ? Ce n’est pas le cas chez les animaux, même si la maternité est un gros sujet dans ce film.
Un robot a-t-il un coeur ?
Tous ces éléments nous amènent au principal questionnement de ce film : les robots ont-ils une âme ou tout du moins un coeur ? Les histoires de Joli Bec et Roz insistent sur le fait qu’ils deviennent ce qu’ils n’étaient pas destinés à être. De vivre ensemble les a fait évoluer l’un comme l’autre. Tout comme Escobar même si c’est moins marqué. Si Roz agit toujours en fonction de missions qu’on lui confie… ou qu’elle se confie elle-même au fur et à mesure du récit, il n’en reste pas moins qu’elle agit de moins en moins en fonction d’algorithmes très poussés. Elle semble écouter son coeur. Elle se montre plus spontanée au fur et à mesure du récit et si son altruisme fait partie de sa conception, son attachement pour ses compagnons de route est réel.
Courez le voir au ciné
Bref, tout comme Wall-E, je pense sincèrement que Le robot sauvage est un immanquable. Je le recommande chaleureusement à tous, que vous soyez enfants ou adultes. Quelques larmes pourront couler par moment mais je vous rassure, ce sont de belles larmes. Je suis tout à fait persuadée que vos enfants sortiront de la séance enchantés. Finalement, mes seuls deux bémols sur ce film sont deux ou trois passages à base de “ah, je voulais te dire quelque chose mais tu es déjà parti”, rebondissement un peu cheapos à mon goût. Et je trouve également qu’on ne voit pas assez les loutres alors que ce sont mes animaux prefs.
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