Une dystopie française avec Blanche Gardin en tête d’affiche et un robot qui a le look des Pepper, ces supports à tablette bien encombrants ? On est à la limite du Kamoulox. Et pourtant, vient de débouler sur nos écran “Un monde merveilleux”, un film relativement futuriste où les robots occupent plein de fonctions diverses et les gens se retrouvent au chômage. Un film quelque part entre le road trip et le drame social.

L’encombrant robot de la famille
L’histoire. 2040, France, Max est dans la dèche. Vivant de petits larcins et de débrouille, elle élève comme elle peut sa fille Paula. Son coup préféré ? Aller voler les robots de compagnie des vieux dans les ehpad. C’est ainsi qu’elle se retrouve en possession d’un T0 dit Théo. Le problème, c’est que les modèles de robots en vogue sont les T4 et T5. Théo est obsolète, impossible de le revendre. Paula s’étant attachée au robot, Max et elle le trimballent partout, entraînant leur chute lors d’un vol dans une supérette. Paula étant placée chez sa tante, Max se lance dans un périple pour la récupérer.

Quand les robots piquent ton job
Un monde merveilleux s’inscrit donc directement dans le débat actuel sur les IA qui nous piquent notre travail. On apprend rapidement que Max était professeure mais qu’elle a été remplacée par un robot. Lors d’un passage à l’hôpital, on apprend aussi que les médecins vont peu à peu céder leur place à des bonhommes en plastique. Et tout ce joyeux petit monde se retrouve au chômage sans que rien ne soit prévu pour eux. C’est là le premier souci que j’ai avec le film : l’univers est un peu branlant. Les robots ont remplacé les professions intellectuelles mais pas les professions les plus “simples” à remplacer comme les caissiers. On voit bien des caisses automatiques à un moment mais rien d’innovant, ce sont les mêmes qu’aujourd’hui.

Rien n’a changé, sauf les robots
D’ailleurs, le monde n’a pas changé, si ce n’est la forte présence des robots dans les rues. Certes, l’action se passe dans un futur très proche, 2040, dans à peine 15 ans donc on ne s’attend pas à voir des voitures volantes dans la rue. Mais la temporalité n’est pas claire. Même si les modèles de robot évoluent vite puisqu’on en déjà au T5, soit la sixième génération. Il y a un mouvement anti-robot dont on apprend l’existence via notamment des gens qui s’en plaignent dans le métro. Ok mais du coup, si les robots sont arrivés depuis suffisamment longtemps pour qu’on en soit à la sixième génération, comment ça se fait que ça semble être encore un objet de débat ? Et que l’on envisage de remplacer les médecins par des robots alors qu’ils sont hyper patauds.

Le progrès, c’est cool tant qu’on n’est pas menacés
Le film nous parle de ces gens laissés sur le carreau par une évolution de la société qui les dépasse. Des gens en colère qui “rejettent le progrès”. Max est présentée pendant le premier tiers du roman comme une anti-robot et pour cause. Elle est une victime avant tout. Une victime qui doit se débrouiller comme elle peut, presque une figure de résistance. Ce parti-pris est intéressant car il montre un fait de société assez simple, déjà existant en 2025 : ceux qui ne sont pas menacés par un phénomène de société, une nouvelle technologie, ne comprennent pas la réticence de ceux qui sont en première ligne. Un peu le fameux poème “Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste, etc.”

Des robots qui apprennent vraiment très vite
Sauf que le film ne tient pas cette ligne très longtemps. Grâce aux incroyables facultés d’apprentissage de Théo, Max va finir par s’y attacher. On en arrive au point traditionnel “l’âme des robots”. Au début du film, on voit Théo en plein apprentissage qui enregistre les demandes, certes ironiques, de Max pour pouvoir s’en resservir. Puis il va intégrer tout un tas de vérités et de consignes sans rien demander à personne, devenant ainsi le parfait complice de Max. Il devient d’ailleurs totalement autonome et finit par prendre ses propres décisions. Une courbe d’apprentissage incroyable sur cette aventure qui n’a l’air de durer que quelques jours. Je serais d’avis de vite désactiver tous les T-quelque chose parce que ça va finir en Terminator, cette histoire.

Un feel-good movie
Alors est-ce que je recommande Un monde merveilleux ? Dans l’absolu, oui. Le film est plutôt feel good et ne dure qu’1h20, allant droit au but. J’ai eu quelques réserves sur la vulgarité de Max qui passe son temps à jurer et à être agressive et cynique de façon un peu trop systématique. On va passer sur l’aspect pataud des robots, look qui permet de mettre une actrice dedans mais on n’a pas les moyens d’un Marvel non plus. Et je préfère les effets pratiques aux effets numériques parfois horribles qui me font sortir du film.

Deux êtres que tout oppose, vraiment ?
Je suis aussi un peu embêtée par la voie prise par le film. C’est un classique : deux êtres que tout sépare se rencontrent et se transforment en s’apportant des choses mutuellement. Ok. Sauf que Théo est un robot qui évolue uniquement en fonction de ce qu’il acquiert au contact de Max. Elle, elle passe très vite de “tu n’es qu’un grille-pain” à “tous les robots sont pourris sauf Théo », changeant radicalement son discours au fil du film. Alors que sa situation de départ n’évolue finalement pas et que Théo lui a causé plus d’ennuis qu’autre chose. Il a certes cassé un peu sa solitude pendant quelques jours mais après…

Parler de robots et d’AI avec humour
Mais là, je demande trop à un film qui se veut une comédie de moeurs plutôt légère et bien rythmée. Une fois passé le premier tiers, on s’habitue à la ronchonnerie de Max, ou celle-ci est tempérée par le road trip initiatique avec Théo. Je ne suis pas sûre. Et la fin est plutôt sympa, la dernière scène étonnamment rigolote. C’est de bien meilleure facture qu’une comédie sur le sujet avec Christian Clavier ou Didier Bourdon où un vieux Bourgeois colérique se retrouve en prise avec un robot trop littéral, par exemple. Et puis le prisme de la comédie pour un sujet qui agite beaucoup l’imagination depuis quelques années, ma foi… Ca change un peu.