The boys, la politico-dystopie

Une série qui caricature férocement les super-héros et délivre un message politique anti-fasciste : c’est The boys.

Ceux qui me lisent depuis des années savent que je suis un peu piquée de politique. Pas par envie d’y faire carrière. Mais en tant que force qui anime un système. Et la politique dispose de quelques outils assez vicieux à sa disposition comme la propagande. Ou sa petite sœur, la démagogie. Des sujets qui inspirent de nombreuses œuvres de fiction. Comme The Boys, une histoire de super-héros bien trash.

The boys, la première équipe des Sept

L’histoire. Aux États-Unis, des personnes naissent avec des pouvoirs. C’est le cas de la jeune Annie qui maitrise l’électricité. Elle postule pour rejoindre les “Sept”, un groupe de super-héros employés par une société privée, Vought. En parallèle, le jeune Hughie perd tragiquement sa fiancée  quand celle-ci est violemment pulvérisée par A-Train, l’homme supersonique qui courait dans les rues de la ville. Au désespoir, ivre de vengeance, il est contacté par Butcher, un homme sombre et violent qui, lui aussi, a des comptes à régler avec les super héros. Et plus précisément Homelander, leur leader.

A l’heure actuelle, je n’ai vu que la série. J’avais prévu de lire les comics pour cette chronique mais je manque un peu de temps. Je réécrirai un article si j’ai des choses à dire dessus. De l’avis de mon mec, le comics est bien mieux, les intrigues assez différentes. Donc on va parler de la série qui présente quand même deux thèmes dystopiques majeurs : l’arrivée insidieuse du fascisme à travers une figure charismatique et une résistance plus ou moins organisée en face. Des sujets qui me passionnent donc et qui étaient là motivation principale pour mater cette série. Oui parce que les super-héros, à un moment… On en a un peu trop soupé.

Soldier Boy, caricature de Captain America
Ah oui, y a une caricature de Captain America, aussi

The Boys se posent en caricature féroce de l’univers des Super héros. Dans le premier épisode, on s’amuse à chercher les correspondances entre les Sept et leurs pendants super-héroïques. Homelander est Superman, Queen Maeve, Wonder Woman, A-Train est Flash, The Deep est Aquaman… une énergie très Justice League. Mais une Justice League trash, ravagée par la drogue, le sexe, la soif de reconnaissance et la dépression. Bref, je rappelle que le mot d’ordre de la série est “trash”. Mais derrière cette version glauque de nos super-héros préférés se cache un discours éminément politique cristallisé autour du personne de Homelander. Une sorte de gros bébé surpuissant. D’abord perçu comme un personnage un peu lointain, on va vite réaliser que son absolutisme le pousse à commettre des crimes sans le moindre état d’âme.

Homelander en plein délire égotique

Car, outre son besoin de reconnaissances et de figures parentales, Homelander a une soif de pouvoir inextinguible. Il veut pouvoir agir à sa guise selon ses valeurs qui, on va le comprendre assez vite, sont plutôt très fascistes. Violemment patriote, il estime que la sécurité des citoyens américains justifie toute la violence dont il se rend coupable. Il assassine un politique peu favorable à l’idée de déléguer la sécurité du territoire à Vought. Qui est, rappelons-le, une société privée. Il va également laisser un avion civil plein à craquer s’écraser après une intervention ratée pour sauver les passagers de terroristes musulmans. L’occasion rêvée pour faire un peu de propagande.

Homelander descend un avion

Car Homelander est un héros à double visage. Un forcené fasciste et meurtrier côté coulisses. Mais en public, il sait montrer un visage lisse, maîtrisant à la perfection les codes des médias. Ca aussi, c’est une dimension très importante, le marketing. On le découvre à travers Annie, devenue Starlight. Outre son intronisation tapageuse au sein des Sept, elle doit réaliser des rondes dans des lieux où des exactions seront certainement commises pour assurer le spectacle. Il y a également tout un délire autour des films mettant en scène les Sept, caricature tout à fait assumée des Avengers avec toujours les titres genre “Dawn of Justice”, “Awakening” ou je ne sais quoi. Il doit y avoir un Apocalypse qui traîne, aussi. D’ailleurs, la fidèle soldate du marketing de la saison 01 finit par devenir directrice générale de Vought. On assiste donc à la médiatisation outrancière de nos héros, de leurs amours à leurs drames personnels, le tout pour renforcer la bonne image qu’ils ont dans le coeur des citoyens. Il existe aussi énormément de goodies dont des parfums dont on voit régulièrement des affiches promotionnelles. 

Starlight, idole des petites filles

Et puis il y a la Résistance. Ici, pas de combattants au grand coeur. Tous ont un compte à régler avec un Super héros. La femme de Butcher a été violée par Homelander, la copine de Hughie pulvérisée par A-train, la famille de La Crème massacrée à cause de Soldier Boy. On découvrira aussi que “Le colonel”, l’éminence grise de service agit car elle a été victime du grand laxisme de ces grands enfants qui sèment la mort autour d’eux. Il n’y a pas tant de cause à défendre ici. Seule Starlight, nom lumineux, semble se battre pour de nobles causes, voulant empêcher Homelander d’acquérir plus de pouvoir. Guidée par un sentiment aigu de justice, elle a tout de même quelques failles égotiques à combler. La question de la résistance est intéressante dans The boys car elle souligne en creux celle de la collaboration. Active ou passive. Queen Maeve semble préférer ne pas se mêler de la gué-guerre entre Starlight et Homelander, ne voulant pas s’attirer les foudres de ce dernier. The deep et A-train ont conscience que Homelander est problématique mais être dans son camp leur paraît plus avantageux que d’être contre lui. 

The deep vs A Train

Citons également la thématique de la big entreprise qui semble avoir plus de pouvoir que les politiques. Dans la série, ce thème est surtout présent dans la première saison mais surnage par la suite avec le personnage de Victoria Neuman, prétendante au rôle de députée et directement inspirée d’Alexandria Ocasio-Cortez. Là aussi, sous ses airs de grande humaniste se cachent de sombres secrets. On est ici dans un questionnement sur l’ultralibéralisme ou comment les big entreprises dictent leurs envies aux politiciens, contraints de suivre… ou mourir, comme dit plus haut. Il sera révélé que Vought a fait des super-héros son business car il est responsable de leur apparition.

A Train vend des boissons énergétiques

 On va également avoir un passage sur une secte évangéliste, dans le grand maelström des éminences grises éventuellement dangereuses pour le pays. Parce que The Boys a un côté assez foutraque, on ne va pas se mentir. Décidant régulièrement de s’asseoir sur la subtilité comme quand, par exemple, Homelander se retrouve sous le charme d’une super-héroïne nazie. Ah, son besoin d’amour et de reconnaissance le fait basculer dans le nazisme… Alors, je pense pas, personnellement, qu’il avait besoin de ça, il y est depuis sa naissance dans les labos de Vought. On va aussi avoir des arcs narratifs qui servent juste à se moquer de The Deep, l’Aquaman local, du cul gratos, la relation Hughie-Annie qui nous la joue grand classique des séries télé “on s’aime mais on se sépare sur des malentendus”. 

Annie et Hughie, un couple compliqué

Je trouve que la série aborde des sujets très intéressants, notamment le “formatage” médiatique où Homelander peut sortir les pires horreurs et être acclamé. Il réunit, malgré lui pour le coup, une sorte de gang masculiniste derrière lui. Starlight, la seule qui a un peu de rigueur parmi les Sept, est régulièrement mise à l’écart voire carrément renvoyée car elle ne rentre pas dans le délire de Homelander. Homelander qui pourrait être le titre de la série, plutôt que The boys qui fait référence au clan de Butcher, tant tout tourne autour de lui. Et c’est parfois le souci, justement. De parfaitement terrifiant, il devient, au fil des épisodes, un gros bébé grognon qui se fait régulièrement humilier par le scénario. Oui, on a bien compris que l’absence d’amour parental, tant paternel que maternel, a fait de lui un monstre. On peut lâcher un peu là-dessus, je pense. De la même façon, la série se revendique comme trash et, outre les scènes de cul et d’orgies sexuelles parfois random, on a régulièrement droit à des corps explosés, mutilés. Coupés en deux, éviscérés, cramés par le laser d’Homelander… Au point qu’à un moment, tu ne réagis même plus. Ah, tiens, Homelander a encore cramé la tête d’un type. Original. 

The boys, Homelander vs Butcher

Bref, j’ai bien aimé la saison 01 puis, petit à petit, mon intérêt s’est un peu érodé. Un certain manque de subtilité dans le message. Un gros vilain régulièrement humilié par le scénario. Des personnages dont les auteurices ne savent plus que faire (The deep). Le côté série ado avec les amours un peu nulles d’Annie et Hughie. Pourtant j’aime bien le personnage d’Annie, son parcours du rêve à la désillusion. Ok, c’est l’archétype de la Mini miss qu’on retrouve dans beaucoup de séries mais j’ai de la sympathie pour elle. Pour Kimiko et Maeve aussi. Mais y a un goût de sauce trop délayée, comme souvent dans des séries qui ont un bon concept mais se retrouvent vite à avoir dit tout ce qu’elles avaient à dire. Reste une BO assez cool, tout de même. 

Et un petit lien vers la vidéo de Bolchegeek sur The boys parce que c’est bien.

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