A la recherche d’une série à regarder, je tombe sur Tales from the Loop. Tiens, qu’est-ce que c’est ? L’histoire de personnes vivant dans un village autour d’une mystérieuse entreprise. Il y a des robots au look rétrofuturiste. Ah oui, le look rétrofuturiste, ça me séduit toujours instantanément et ça fait une suite logique avec Fallout. Ce que je n’avais pas anticipé, c’était l’aura mélancolique qui se dégage de cette oeuvre qui va me marquer pour un bon moment.

Pierre mystérieuse et saut dans le temps
L’histoire. Mercer, Ohio. Un petit village vit à proximité de la société The Loop dont on sait assez peu de choses, si ce n’est qu’il ont pour ambition de découvrir les secrets de l’univers grâce à un étrange accélérateur de particules. On sait que The loop est situé sous la terre, on n’en aperçoit que trois immenses cheminées à la surface. Un de leurs robots erre également dans la forêt et on trouve, de ci, de là, quelques artefacts. Dans le premier épisode, une femme ramène une pierre mystérieuse de The loop qu’elle veut étudier en secret. Le lendemain, en rentrant de l’école, sa fille va découvrir que sa maison a disparu. Elle va errer dans la ville pour essayer de retrouver sa mère et croit, à un moment, l’apercevoir dans un bar. Sauf qu’il s’agit de Loretta, qui travaille au Loop avec son mari George, sous l’égide de son beau-père Russ, fondateur de l’entreprise. Sauf que Loretta est choquée en rencontrant la petite fille car… c’est elle, enfant.

Jouer avec le temps grâce à de mystérieux artefacts
Alors voilà, l’épisode 01 pose une anomalie temporelle. Alors je résume vite fait : une entreprise avec d’énormes cheminées qui font partie du décor de la ville, une forêt avec des artefacts un peu bizarres, des anomalies temporelles, une femme qui est à la fois adulte et enfant dans le même espace temps… Ah mais c’est Dark, en fait. Effectivement, le premier épisode fait fortement penser à cet univers-là mais très vite, on va découvrir d’autres fantaisies de cet univers. Comme une machine qui permet d’intervertir les corps, une bête mystérieuse dans la forêt, une machine qui arrête le temps et permet à deux ados de s’aimer en cachette…

Des histoires qui racontent des personnages touchés par la technologie du Loop
Tales from the loop est originellement un projet artistique, celui de Simon Stalenhag, un artiste suédois qui a réalisé un BD qui raconte la vie d’un village suédois qui se développe autour d’une entreprise mystérieuse. La série a transposé l’intrigue dans un Etat froid et boisé pour rappeler les paysages suédois et repris le look brutaliste et rétrofuturiste de la BD. La série semble se décliner en anthologie, les premiers épisodes me faisant l’effet d’un passage de témoin. On suit d’abord l’histoire de Loretta. Episode 2, la série nous raconte l’histoire de Jakob, le fils de Loretta et de son ami Danny. Lors de l’épisode 2, Jakob sort avec May qui devient l’héroïne de l’épisode 03. Mais à l’épisode 04, on revient sur Russ, le fondateur, et Cole, son petit-fils, personnages qui n’ont aucun lien avec May. La plupart des intrigues tourneront autour de cette famille puisque chaque personnage, y compris George, auront leur épisode. Un autre concernera la famille de Danny, meilleur ami de Jakob, et un… le gars qui travaille dans la guérite d’accueil du Loop.

Une technologie qui dépasse ceux qui essaient de s’en servir
Curieusement, si l’entreprise Loop est au coeur des différentes histoires, on n’en saura pas grand chose. Il y a le coeur de tout, une sorte d’amalgamat de pierres étranges. Mais d’où il vient, à quoi il sert ? Personne ne le saura. On retrouve cette idée d’une technologie dangereuse car non maîtrisée dans Tales from the loop puisque la présence de l’entreprise et des artefacts semés à droite, à gauche, impliquent les villageois presque malgré eux. Car beaucoup d’objets semblent, de prime abord, innocents. Normalement, quand on répare un vieux tracteur, on ne s’attend pas à être transporté dans un univers parallèle à son redémarrage. Les personnages de Russ et Loretta sont ainsi très ambivalents. Impliqués plus que de raison dans les recherches du Loop, ils ont des airs d’alchimistes. Aucune idée de ce qu’ils font mais ils le font. D’ailleurs, les tests de Russ seront matérialisés dans l’épisode où son fils, George, se retrouve sur une île sois-disant habitée par un monstre.

Variations sur l’âme humaine
Mais le vrai sujet de Tales from the loop, c’est l’âme humaine. L’âme humaine dans ses obsessions, dans son insatisfaction, dans sa peur de la mort. Ce sont des histoires d’ados qui ne veulent pas de la vie qui leur est promise, de celle qui se lasse de tout, de celui qui n’ose pas être qui il est. La série revient sur la question que l’on croise souvent sur les dystopies à base d’androïdes : qu’est-ce qui fait l’âme ? Le corps, l’esprit ? Car à travers quelques personnages et création du Loop, on pose la question de l’immortalité. La série pose clairement la question des limites de l’Humain face à la mort : alors que Russ est atteint d’une maladie grave, son petit-fils Cole qui l’adore le supplie de trouver une façon de se guérir ou de survivre à son propre corps. La série pose aussi la question de l’identité. Celle de Jakob et Danny, celle de Gaddis, celle de l’institutrice.

Le temps comme ingrédient de la mélancolie
La question du temps est également centrale. Soit parce que des personnages sautent dans le temps malgré eux par des anomalies créées par le Loop, soit que l’un d’entre eux trouve le moyen de l’arrêter et de s’offrir une vie clandestine jusqu’à ce que la lassitude l’atteigne. Le temps joue irrémédiablement contre les personnages, les rendant souvent mélancoliques. Et à propos de mélancolie, la série force le trait dessus. Outre des choix de couleurs plutôt délavées sans être ternes, évoquant des photos d’un temps passé, beaucoup de passages sont appuyés par la musique de Philip Glass qui m’a fait penser plusieurs fois au travail de Max Richter sur The leftovers, notamment la chanson The departure, thème fort de la série que j’ai eu en tête pendant plusieurs jours.

Un bijou esthétique pour amoureux d’ambiances
Est-ce que je conseille Tales from the loop. Et bien, ça dépend. Pour ma part, j’ai aimé. Au point que je vais m’empresser de lire le matériel original, la BD de Simon Stalenhag. Déjà pour voir si on en apprend plus sur ce qu’est le Loop mais aussi parce que j’ai envie de me replonger dans cet univers. C’était mélancolique et, ayant perdu mon chat très récemment, je suis hypersensible à ces thématiques. Notamment celle du deuil. Je l’ai regardée à un moment où je ne pouvais que réagir fortement à la série qui m’a marquée et qui va me trotter en tête pendant quelques temps. Elle est esthétiquement belle mais si vous cherchez de l’action, ce n’est pas là que vous en trouverez. Ce qui n’est pas un défaut pour moi.