Vu il y a quelques années, je n’ai jamais pris le temps de parler de Bunker Palace Hotel et je trouve que cette période de confinement est parfaite pour le faire. Découvert au détour d’une chronique du Fossoyeur de Films, j’ai été immédiatement séduite par l’atmosphère blockhaus de cette oeuvre dystopique pour le moins étrange mais riche en thèmes divers et variés. Une sorte d’hybride entre Silo… et Shining, un peu. Aujourd’hui, on s’enfonce au coeur de la terre, dans un bunker destiné à l’élite.
Un bunker pour les hauts dignitaires
Dans un futur plus ou moins indistinct, un pays est dirigé par une dictature, ballotée par une rébellion qui menace de tout emporter sur son passage. Les hauts dignitaires du régime se précipitent donc par le bunker commandé par le Président et réalisé par Holm, un architecte et ingénieur. Parmi les réfugiés de ce bunker, la jeune Clara, rebelle qui a réussi à s’infiltrer dans le bunker et que l’on va suivre dans cet univers étrange et presque un peu malaisant. Pendant que les hauts dignitaires atteignent le Président qui tarde à venir, l’hôtel se dégrade petit à petit et les morts se succèdent.
Claustrophobique
Bon, on ne va pas se mentir mais ce film vaut essentiellement pour son esthétique et son ambiance bizarre. Le béton omniprésent et l’absence de toute lumière extérieure crée une sensation d’étouffement assez fort et l’on frôle la claustrophobie quand on sent que les personnages ne sont pas les invités d’un hôtel mais les proies d’un piège. Les robots-nurses, sorte de figure maternisante terrifiante, vous glacent à chaque apparition. Oui, tout est froid et glacial, y compris les personnages. Pour le coup, le choix de Carole Bouquet dans le rôle de Clara semble particulièrement pertinent.
Une métaphore de la société
Maintenant, prenons de la hauteur et analysons cette dystopie pour ce qu’elle est. Ici, on est dans la fuite de Varenne du futur. Les élites qui fuient en grimpant dans un train pour rejoindre une planque, l’écroulement d’un système sous la pression populaire… L’histoire n’est rien de plus que l’effondrement dudit système. Le début du film nous montre la fuite sous une étrange pluie, un sentiment de panique et d’urgence. Puis le confort rassurant du bunker… Sauf que l’histoire nous est présentée à travers les yeux d’une intruse. Pas si clos que ça, le bunker se délite au fur et à mesure que la société du dessus s’écroule. Les hauts dignitaires sont supprimés les uns après les autres, vestiges d’une société dont plus personne ne veut.
Versailles déconnecté du peuple
Les élites qui se mettent à l’abri est le niveau ultime de lutte des classes. Alors qu’au dehors, le chaos menace, ils sirotent tranquillement leur verre autour d’une piscine. En ces temps troublés de coronavirus et de politiques qui ont géré strictement n’importe comment, allant au théâtre ou sur les bords de Seine avant de nous hurler de rentrer chez nous, ce film est criant d’actualité. Le peuple souffre loin des yeux de l’élite, occupée à ses propres micro-dramas. Alors que le peuple lutte en haut, les habitants du bunker perdent l’eau chaude puis le chauffage et vivent en cela un vrai drame. Tellement une métaphore de la cour de Versailles… Le bunker, véritable métaphore de la société, éliminera ces hauts-dignitaires de l’ancien monde.
Ce film est un véritable OVNI dans l’univers cinématographique et semble provoquer une réaction tranchée : on aime ou pas. L’histoire en elle-même est intéressante pour son twist final, que je ne vous ai bien sûr pas chroniqué. L’esthétique est assez troublante, une sorte de laideur fascinante tout en béton et robots-nurses parfaitement flippants. Car il y a une vraie réussite dans ce film quoi qu’on en dise : c’est oppressant. Est-ce que je vous le conseille ? Plutôt oui. Mais je ne suis pas objective : j’aime un peu trop les dystopies confinées.
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